Homélie du 14 juillet 2024

Il commença à les envoyer

15ème dimanche du Temps Ordinaire (semaine III du Psautier) - Année B

Une homélie de fr. Pierre de Béthune

Homélie :
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Ce petit texte nous révèle deux choses essentielles. Et d'abord qu'il nous faut aider le Christ dans la mission qu'il a reçue du Père, et ensuite que, pour cela, nous devons demander, à notre tour, l'aide des autres, dans une vraie collaboration, pour que vienne son Règne.

En effet, quand Jésus commence sa mission, la première chose que nous le voyons faire, c'est de choisir des collaborateurs. Il commence par appeler des disciples : «  Venez à ma suite !  ». Il ne met pas son honneur à tout faire, tout seul, comme un self made man. Il demande de l'aide, dès le début. Il a quitté sa maison de Nazareth, et désormais, il dépend des autres pour sa subsistance et son logement. Il habite chez Simon ou d'autres qui veulent bien l'héberger. Bien sûr, il sait ce qu'il veut, toujours en lien avec son Père des Cieux, mais pour la façon de procéder, il compte sur les autres.

Il est nécessaire de régulièrement nous rappeler que 'Dieu a besoin des hommes'. Il n'intervient pas comme les dieux de l'Olympe qui tombent sur les humains comme la foudre ou la rosée. Il respecte notre liberté et attend toujours de nous non seulement notre consentement, - mais aussi notre collaboration.

Être disciple ne consiste donc pas seulement à accueillir son enseignement et à vivre comme il de demande. Parce que Jésus demande aussi de participer à sa mission, pour continuer son œuvre. L'évangile de Marc le dit très clairement : il a choisi des disciples «  pour qu'ils soient avec lui, et pour les envoyer  ». C'est la première chose à toujours nous rappeler : nous sommes toujours des 'disciples-missionnaires', comme le pape François aime nous le dire.

En finale de l'évangile de Marc, Jésus dit :«  Allez par le monde entier proclamer l'Évangile à toute la création  ». Mais, comme on le verra, cette 'proclamation' n'est pas nécessairement une prédication ! Le témoignage le plus 'parlant' est souvent sans paroles, une façon d'être, de servir, d'accueillir...

Dans l'évangile d'aujourd'hui, Jésus explique en effet comment ses disciples doivent annoncer le Règne de Dieu. C'est la deuxième chose essentielle qui nous est révélée ici, dans la suite du texte.

C'est un texte assez étrange, parce qu'il ne dit pas ce que nous devons dire, le contenu de la prédication ; il précise seulement la façon de nous y prendre. : «  ...ne rien prendre pour la route, pas de pain, pas de sac, pas de pièces de monnaie, » Comment comprendre ces injonctions ?

On a toujours expliqué qu'il s'agissait ici encore de recommandations en style hyperbolique, comme quand Jésus nous demande de couper la main ou le pied qui aurait été occasion de péché. En disant de ne rien prendre avec soi, il recommanderait seulement aux envoyés, aux missionnaires, d'être vraiment détachés de tous les biens de ce monde.

Mais je me demande s'il ne faut pas prendre ce texte-ci à la lettre, non pas comme une invitation à être détachés, mais bien à se découvrir dépendants de nos hôtes. En effet, si les envoyés n'ont même pas de pain pour la route, pas de monnaie, pas d'habit de rechange, ils sont bien obligés de demander l'hospitalité. Et c'est ainsi, comme demandeurs, comme demandeurs d'asile, que Jésus leur propose d'aller. Avant de 'donner gratuitement', il faut avoir fait l'expérience d'avoir 'reçu gratuitement' de nos hôtes.

D'ailleurs c'est bien ainsi que Jésus lui-même a vécu et enseigné. Il demandait l'hospitalité à Pierre, à Mathieu, à Lazare, à Simon, à Zachée. À la Samaritaine, il commence par demander : «  Donne-moi à boire  ». Il demande constamment à être reçu chez les siens, au risque de ne pas toujours être bien reçu, -- on l'a vu récemment, -- et de n'avoir parfois pas une pierre où reposer la tête.

Pour témoigner de l'Évangile, il demande donc à ses disciples de commencer par se mettre dans une attitude d'humilité. Pour se présenter au nom de Jésus, les envoyés doivent d'abord demander humblement d'être reçus, non pas comme des bienfaiteurs, mais comme des hôtes, des demandeurs d'asile. Quand alors les disciples auront «  trouvé, dans une maison, l'hospitalité  » dont ils ont besoin, ils pourront effectivement annoncer le Dieu de Jésus-Christ, ce Dieu qui a besoin des hommes.

Nous pouvons vérifier cela dans notre vie quotidienne. Nous ne sommes peut-être pas dans une situation où nous devons annoncer explicitement l'Évangile, mais nous pouvons toujours en témoigner ainsi, sans paroles, et je dirais savoureusement, en étant le sel de la terre ou le levain dans la pâte. Bien sûr, il faut quelquefois donner, partager, dans toute la mesure de nos possibilités. C'est une façon de témoigner de la générosité de Dieu. Mais il ne faut pas oublier de recevoir ! Car celui qui possède une richesse, une compétence, des relations ou même la Vérité de l'évangile, risque de surplomber, en quelque sorte, son interlocuteur et il fausse dès le début la relation. Par notre façon de demander d'être reçu, et en commençant par écouter, nous pouvons apporter beaucoup de paix, de courage et, souvent même, de lumière. Les parents et les éducateurs savent combien il est important de prendre le temps pour écouter, avant d'éventuellement donner un conseil. On lit dans les Actes des Apôtres que Jésus aurait dit un jour qu'«  il y a plus de joie à donner qu'à recevoir  ». C'est vrai, mais, lors d'une première rencontre, il y a plus d'urgence à recevoir que de donner. C'est bien de donner généreusement, mais il est parfois plus difficile, et aussi plus important, de bien recevoir.

Plus fondamentalement, ce passage de l'Évangile nous rappelle ce qui est au cœur de toute relation, et dont nous faisons l'expérience dans l'amour : oui, quand nous aimons, nous entrons dans la dépendance de la personne aimée. En demandant à ses disciples de commencer par demander l'hospitalité, et donc de se mettre sous la dépendance de leurs hôtes, Jésus indique que l'évangélisation est une invitation à respecter le chemin de l'amour : aimer et se découvrir dépendant, ou, en retour, se mettre dans une situation de dépendance et susciter l'amour.

Susciter l'amour. Mes frères, mes sœurs, c'est à cela que nous sommes appelés, c'est pour cela que nous sommes envoyés. Notre mission de chrétien est d'annoncer l'amour gratuit de notre Père des cieux, mais cet amour ne tombe pas du ciel ; il est enfoui dans le cœur de tout homme créé à son image. A nous de le réveiller, de le ressusciter, en nous présentant démunis, au plus vrai de nous-mêmes, et en faisant confiance, en faisant appel à la bonté des humains, plus profonde que tous les égoïsmes, les calculs et les indifférences mondialisées. C'est ainsi que nous pouvons répandre la lumière et la saveur de l'Évangile.

En nous rassemblant pour célébrer et partager le repas du Seigneur, nous apprenons de lui à nous accueillir les uns les autres. Oui, comme le demandait saint Paul aux Romains : «  Accueillez-vous les uns les autres, comme le Christ vous a accueillis, pour la gloire de Dieu  ». (Rm 15, 7)

 

Va, tu seras prophète pour mon peuple

En ces jours-là, Amazias, prêtre de Béthel, dit au prophète Amos : « Toi, le voyant, va-t'en d'ici, fuis au pays de Juda ; c'est là-bas que tu pourras gagner ta vie en faisant ton métier de prophète. Mais ici, à Béthel, arrête de prophétiser ; car c'est un sanctuaire royal, un temple du royaume. » Amos répondit à Amazias : « Je n'étais pas prophète ni fils de prophète ; j'étais bouvier, et je soignais les sycomores. Mais le Seigneur m'a saisi quand j'étais derrière le troupeau, et c'est lui qui m'a dit : ?Va, tu seras prophète pour mon peuple Israël.' »

- Parole du Seigneur.

Am 7, 12-15

J'écoute : que dira le Seigneur Dieu ? Ce qu'il dit, c'est la paix pour son peuple et ses fidèles : son salut est proche de ceux qui le craignent, et la gloire habitera notre terre.

Amour et vérité se rencontrent, justice et paix s'embrassent ; la vérité germera de la terre et du ciel se penchera la justice.

Le Seigneur donnera ses bienfaits, et notre terre donnera son fruit. La justice marchera devant lui, et ses pas traceront le chemin.

Ps 84 (85), 9ab.10, 11-12, 13-14

Il nous a choisis dans le Christ avant la fondation du monde

Béni soit Dieu, le Père de notre Seigneur Jésus Christ ! Il nous a bénis et comblés des bénédictions de l'Esprit, au ciel, dans le Christ.

Il nous a choisis, dans le Christ, avant la fondation du monde, pour que nous soyons saints, immaculés devant lui, dans l'amour.

Il nous a prédestinés à être, pour lui, des fils adoptifs par Jésus, le Christ.

Ainsi l'a voulu sa bonté, à la louange de gloire de sa grâce, la grâce qu'il nous donne dans le Fils bien-aimé.

En lui, par son sang, nous avons la rédemption, le pardon de nos fautes.

C'est la richesse de la grâce que Dieu a fait déborder jusqu'à nous en toute sagesse et intelligence.

Il nous dévoile ainsi le mystère de sa volonté, selon que sa bonté l'avait prévu dans le Christ : pour mener les temps à leur plénitude, récapituler toutes choses dans le Christ, celles du ciel et celles de la terre.

En lui, nous sommes devenus le domaine particulier de Dieu, nous y avons été prédestinés selon le projet de celui qui réalise tout ce qu'il a décidé : il a voulu que nous vivions à la louange de sa gloire, nous qui avons d'avance espéré dans le Christ.

En lui, vous aussi, après avoir écouté la parole de vérité, l'Évangile de votre salut, et après y avoir cru, vous avez reçu la marque de l'Esprit Saint. Et l'Esprit promis par Dieu est une première avance sur notre héritage, en vue de la rédemption que nous obtiendrons, à la louange de sa gloire.

- Parole du Seigneur.

Ep 1,3-14

Il commença à les envoyer

Evangile de Jésus Christ selon saint Marc

En ce temps-là, Jésus appela les Douze ; alors il commença à les envoyer en mission deux par deux. Il leur donnait autorité sur les esprits impurs, et il leur prescrivit de ne rien prendre pour la route, mais seulement un bâton ; pas de pain, pas de sac, pas de pièces de monnaie dans leur ceinture. « Mettez des sandales, ne prenez pas de tunique de rechange. » Il leur disait encore : « Quand vous avez trouvé l'hospitalité dans une maison, restez-y jusqu'à votre départ. Si, dans une localité, on refuse de vous accueillir et de vous écouter, partez et secouez la poussière de vos pieds : ce sera pour eux un témoignage. » Ils partirent, et proclamèrent qu'il fallait se convertir. Ils expulsaient beaucoup de démons, faisaient des onctions d'huile à de nombreux malades, et les guérissaient.

- Acclamons la Parole de Dieu.

Mc 6,7-13