Une homélie de fr. Grégoire Maertens
19ème dimanche ordinaire (C) - 7 août 2022 (6)
« Heureux ! » Dimanche dernier, Jésus enseignait que le vrai bonheur dépend, pour l'homme, de sa capacité de ne pas s'accrocher à des biens qui, de toute façon, ne le suivront pas dans la tombe, mais de les faire fructifier pour le bien de tous. Notre pape François y revient sans cesse. Ce dimanche-ci, Jésus renchérit : il nous fait connaître un Père qui trouve bon de donner son Royaume à ceux qui, à leur tour, le partageront. Un troisième bonheur, une troisième béatitude, pourrait-on dire, concerne les veilleurs : « Heureux ceux que le Maître trouvera en train de veiller ! » Qu'est ce à dire ? Qu'il les remerciera pour avoir veillé à la bonne marche de la maison en son absence ? Et qu'il ira dormir en leur recommandant de continuer à veiller à sa sécurité ? Eh bien non ! Défiant toute sagesse humaine le Maitre « passera pour servir » ceux qui auront veillé. On sent passer comme un souffle de jeudi saint. Jésus, véritable icône de Dieu !
Mais, à propos, quel est ce bonheur promis au veilleur ? Et ces veilleurs dont parle Jésus, qui sont-ils ? La Libre Belgique évoquait, il y a quelques jours, le vivant souvenir du prêtre Daens : dans la ville d'Alost, au 19ème siècle, ce pasteur d'âmes, encouragé par l'Encyclique sociale « Rerum Novarum » du pape Léon XIII, se livre corps et âme à la lutte pour la défense du monde ouvrier, femmes, hommes et enfants, victimes de conditions de travail innommables : c'était sa manière à lui d'être le serviteur vigilant, d'un Dieu-serviteur, que ce soit parmi ses frères en usine, ou à la Chambre des Députés. Son exemple nous aide à comprendre qu'il n'y a pas de profond bonheur sans cet amour « politique » dont parle le Pape François dans son Encyclique « Fratelli Tutti ». Voici ses mots : « L'amour, qui est fait de petits gestes d'attention mutuelle, est aussi civil et politique, et il se manifeste dans toutes les actions qui essaient de construire un monde meilleur ».(n °181) Reste à savoir maintenant comment accéder à ce chemin heureux mais étroit de la « vigilance » évangélique. Cette veille me rend-elle anxieux, méfiant , ou bien ouvert et heureux ? Regardons les autres lectures de la Parole de ce dimanche. La Lettre aux Hébreux souligne avec insistance que ce n'est pas à la force du poignet que le chrétien peut réaliser ce que le Père attend de lui, mais grâce à la foi : « La foi est un moyen de posséder ce que l'on espère, de connaître les réalités que l'on ne voit pas. » (He 11, 1) Cette foi est présentée comme le bien le plus précieux de ceux que le Livre de la Sagesse appelle précisément nos « Pères » : « La nuit de la délivrance pascale avait été connue d'avance par nos Pères : assurés des promesses auxquelles ils avaient cru, ils étaient dans la joie. » (Sg 18, 6). Enfin, combien de fois Jésus lui-même n'a-t-il pas proclamé que c'est la confiance des personnes, leur foi, qui lui arrachait, si l'on peut dire, des miracles et des signes : « Femme, grande est ta foi », lance-t-il à la Cananéenne intercédant pour sa fille malade, « que tout se passe pour toi comme tu le veux ! » Sans compter la Vierge Marie que nous fêterons dans une semaine. Serait-elle devenue Mère de Jésus si Dieu ne l'avait trouvée vigilante, à son arrivée ? « Voici la servante du Seigneur que tout se passe pour moi selon ta parole. « Luc 1 1, 38) Sa cousine Elisabeth viendra appuyer et confirmer cette acceptation courageuse et aimante de la Vierge : « Bienheureuse, celle qui a cru en l'accomplissement des paroles du Seigneur. (Luc 1, 45)
Mes sœurs, mes frères, transformons en prière confiante la parole entendue ce jour et disons avec le psalmiste qui nous invitait à la confiance : « Que ton amour ; Seigneur, soit sur nous, comme notre espoir est en Toi. » AMEN !
La nuit de la délivrance pascale avait été connue d'avance par nos Pères ; assurés des promesses auxquelles ils avaient cru, ils étaient dans la joie. Et ton peuple accueillit à la fois le salut des justes et la ruine de leurs ennemis. En même temps que tu frappais nos adversaires, tu nous appelais à la gloire. Dans le secret de leurs maisons, les fidèles descendants des justes offraient un sacrifice, et ils consacrèrent d'un commun accord cette loi divine : que les saints partageraient aussi bien le meilleur que le pire ; et déjà ils entonnaient les chants de louange des Pères.
- Parole du Seigneur.
Sg 18, 6-9
Criez de joie pour le Seigneur, hommes justes ! Hommes droits, à vous la louange ! Heureux le peuple dont le Seigneur est le Dieu, heureuse la nation qu'il s'est choisie pour domaine !
Dieu veille sur ceux qui le craignent, qui mettent leur espoir en son amour, pour les délivrer de la mort, les garder en vie aux jours de famine.
Nous attendons notre vie du Seigneur : il est pour nous un appui, un bouclier. Que ton amour, Seigneur, soit sur nous comme notre espoir est en toi !
Ps 32 (33), 1.12, 18-19,20.22
Frères, la foi est une façon de posséder ce que l'on espère, un moyen de connaître des réalités qu'on ne voit pas. Et quand l'Écriture rend témoignage aux anciens, c'est à cause de leur foi.
Grâce à la foi, Abraham obéit à l'appel de Dieu : il partit vers un pays qu'il devait recevoir en héritage, et il partit sans savoir où il allait. Grâce à la foi, il vint séjourner en immigré dans la Terre promise, comme en terre étrangère ; il vivait sous la tente, ainsi qu'Isaac et Jacob, héritiers de la même promesse, car il attendait la ville qui aurait de vraies fondations, la ville dont Dieu lui-même est le bâtisseur et l'architecte.
Grâce à la foi, Sara, elle aussi, malgré son âge, fut rendue capable d'être à l'origine d'une descendance parce qu'elle pensait que Dieu est fidèle à ses promesses. C'est pourquoi, d'un seul homme, déjà marqué par la mort, a pu naître une descendance aussi nombreuse que les étoiles du ciel et que le sable au bord de la mer, une multitude innombrable.
- Parole du Seigneur.
He 11, 1-2.8-12
En ce temps-là, Jésus disait à ses disciples : « Restez en tenue de service, votre ceinture autour des reins, et vos lampes allumées. Soyez comme des gens qui attendent leur maître à son retour des noces, pour lui ouvrir dès qu'il arrivera et frappera à la porte. Heureux ces serviteurs-là que le maître, à son arrivée, trouvera en train de veiller. Amen, je vous le dis : c'est lui qui, la ceinture autour des reins, les fera prendre place à table et passera pour les servir. S'il revient vers minuit ou vers trois heures du matin et qu'il les trouve ainsi, heureux sont-ils ! Vous le savez bien : si le maître de maison avait su à quelle heure le voleur viendrait, il n'aurait pas laissé percer le mur de sa maison. Vous aussi, tenez-vous prêts : c'est à l'heure où vous n'y penserez pas que le Fils de l'homme viendra. »
- Acclamons la Parole de Dieu.
Lc 12, 35-40