Une homélie de fr. Martin Neyt
La Pentecôte nous offre un sentiment de plénitude, d'aboutissement dans l'amour que notre Père des cieux nous transmet. Progressivement, nous entrons dans l'Incarnation de Jésus qui est venu partager notre vie, la traversant par ses actes et sa parole jusqu'à la Passion et la mort sur la Croix. Sa Résurrection et son Ascension nous ouvrent une Lumière sur l'avenir de nos vies et la Pentecôte réalise pleinement ce don divin.
Comment cette étape mystérieuse peut-elle bouleverser notre vie, la transformer intérieurement, transformer nos relations d'une façon nouvelle ? Hier soir, durant nos Vigiles, nous avons béni l'eau qui rappelle notre baptême.Cyrille de Jérusalem écrivait simplement à ce propos : « L'eau donne la vie à tous les corps d'une façon unique. C'est une source qui transforme toute chose. Elle devient blanche dans le lys, rouge dans la rose, elle est tout autre dans le palmier, autre dans la vigne et toute en tous ». Il en va de même dans le Corps du Christ que nous formons et dans nos relations. A travers nous, il vient sauver, guérir, enseigner, conseiller, pardonner, aimer.
Cet Esprit qui souffle dans nos vies, enrichit notre connaissance, fait de nous des enfants d'un Dieu personnel et vivant. « Le Père et moi, nous sommes Un, nous dit Jésus, qui m'a vu a vu le Père ». Et Il répond à Nicodème qui s'interroge sur une nouvelle naissance de l'être humain : « L'Esprit souffle où Il veut. Tu ne sais ni d'où Il vient ni où Il va ». Ces mots sont toujours actuels et nous pouvons nous interroger : Comment l'Esprit Saint agit-il de nos jours, en moi, en nous, dans l'Eglise et la société ?
Il nous invite d'abord à lâcher prise, à laisser Dieu être Dieu dans nos vies. Il est le Maître de l'Histoire. Il parle dans le silence et le recueillement. S'approcher de Lui, c'est s'approcher doucement, ouvrir nos coeurs à sa parole, comme on peut s'approcher d'un oiseau posé sur une branche.
Dans son testament spirituel,Abba Antoine écrit ses mots si souvent répétés et repris par Enzo Bianchi : « Cet Esprit de feu que j'ai reçu, recevez-le, vous aussi. Et si vous voulez le recevoir pour qu'il habite en vous, présentez-lui la discipline du corps et l'humilité du coeur, et avec vos pensées, jour et nuit, occupez-vous de Dieu. Demandez avec un coeur pur cet Esprit de feu et Il vous sera donné ». Antoine enseigne avec insistance à ses disciples à acquérir l'Esprit Saint parce qu'il considère que c'est là l'essentiel de la vie monastique. Acquérir l'Esprit-Saint signifie accueillir la grâce qui nous est offerte surtout par la prière. Et Antoine de poursuivre : « Ne doutez-pas dans votre coeur, n'ayez pas le coeur divisé et ne dites pas : qui pourra le recevoir ? Non, ne permettez-pas que ces pensées envahissent notre coeur, mais plutôt demandons avec un coeur pur et nous obtiendrons l'Esprit-Saint ».
Mes soeurs, mes frères, cette acquisition est un don, une grâce coûteuse. Qu'il me soit fait selon ta Parole, disait la Vierge Marie. Celui qui se laisse habiter par ce feu divin devient lui-même source de compassion, d'amour, d'espérance dynamique.
Donne ton sang et reçois l'Esprit est une devise monastique qui résume cette transmission de vie spirituelle qui passe par nos fragilités. Notre fragilité, cet autre mystère de nous-même, est-elle un signe de mort ou au contraire une porte ouverte sur l'Autre, le Christ Ressuscité ?
La Résurrection n'a pas enlevé les traces de ses blessures. Elles restent ouvertes et dans le Souffle qui nous habite nos propres fragilités deviennent un passage nous permettant d'entrer dans le royaume de Dieu, dans sa miséricorde. Il y a des lieux de sainteté où la présence de l'Esprit est manifeste. Elle l'est d'une manière spéciale auprès des malades. La tradition juive nous rappelle que lorsque nous entrons dans la chambre d'un malade,la Shekinah, l'Esprit de Dieu est là et y repose. Nous ne sommes plus deux, mais trois. L'Eternel est au-dessus de son lit de douleur et soutient le malade. L'Esprit de Dieu couvre chacun de nous, nos familles, nos communautés, l'Eglise, nos sociétés.
Qu'en ce jour de fête, nous soyons les uns pour les autres, ce soutien qui vient d'ailleurs et souffle là où il veut. Qu'il nous donne de pardonner et d'aimer en Celui qui dans l'eucharistie de ce jour nous ouvre le Royaume de son Père.
Quand arriva le jour de la Pentecôte, au terme des cinquante jours après Pâques, ils se trouvaient réunis tous ensemble. Soudain un bruit survint du ciel comme un violent coup de vent : la maison où ils étaient assis en fut remplie tout entière. Alors leur apparurent des langues qu'on aurait dites de feu, qui se partageaient, et il s'en posa une sur chacun d'eux. Tous furent remplis d'Esprit Saint : ils se mirent à parler en d'autres langues, et chacun s'exprimait selon le don de l'Esprit.
Or, il y avait, résidant à Jérusalem, des Juifs religieux, venant de toutes les nations sous le ciel. Lorsque ceux-ci entendirent la voix qui retentissait, ils se rassemblèrent en foule. Ils étaient en pleine confusion parce que chacun d'eux entendait dans son propre dialecte ceux qui parlaient. Dans la stupéfaction et l'émerveillement, ils disaient : « Ces gens qui parlent ne sont-ils pas tous Galiléens ? Comment se fait-il que chacun de nous les entende dans son propre dialecte, sa langue maternelle ? Parthes, Mèdes et Élamites, habitants de la Mésopotamie, de la Judée et de la Cappadoce, de la province du Pont et de celle d'Asie, de la Phrygie et de la Pamphylie, de l'Égypte et des contrées de Libye proches de Cyrène, Romains de passage, Juifs de naissance et convertis, Crétois et Arabes, tous nous les entendons parler dans nos langues des merveilles de Dieu. »
- Parole du Seigneur.
Ac 2, 1-11
Bénis le Seigneur, ô mon âme ; Seigneur mon Dieu, tu es si grand ! Quelle profusion dans tes oeuvres, Seigneur ! La terre s'emplit de tes biens.
Tu reprends leur souffle, ils expirent et retournent à leur poussière. Tu envoies ton souffle : ils sont créés ; tu renouvelles la face de la terre.
Gloire au Seigneur à tout jamais ! Que Dieu se réjouisse en ses ?uvres ! Que mon poème lui soit agréable ; moi, je me réjouis dans le Seigneur.
103 (104), 1ab.24ac, 29bc-30, 31.34
Frères, je vous le dis : marchez sous la conduite de l'Esprit Saint, et vous ne risquerez pas de satisfaire les convoitises de la chair. Car les tendances de la chair s'opposent à l'Esprit, et les tendances de l'Esprit s'opposent à la chair. En effet, il y a là un affrontement qui vous empêche de faire tout ce que vous voudriez. Mais si vous vous laissez conduire par l'Esprit, vous n'êtes pas soumis à la Loi. On sait bien à quelles actions mène la chair : inconduite, impureté, débauche, idolâtrie, sorcellerie, haines, rivalité, jalousie, emportements, intrigues, divisions, sectarisme, envie, beuveries, orgies et autres choses du même genre. Je vous préviens, comme je l'ai déjà fait : ceux qui commettent de telles actions ne recevront pas en héritage le royaume de Dieu. Mais voici le fruit de l'Esprit : amour, joie, paix, patience, bonté, bienveillance, fidélité, douceur et maîtrise de soi. En ces domaines, la Loi n'intervient pas. Ceux qui sont au Christ Jésus ont crucifié en eux la chair, avec ses passions et ses convoitises. Puisque l'Esprit nous fait vivre, marchons sous la conduite de l'Esprit.
- Parole du Seigneur.
Ga 5,16-25
Au jour solennel où se terminait la fête des Tentes, Jésus, debout, s'écria : « Si quelqu'un a soif, qu'il vienne à moi, et qu'il boive, celui qui croit en moi ! Comme dit l'Écriture : De son c?ur couleront des fleuves d'eau vive. » En disant cela, il parlait de l'Esprit Saint qu'allaient recevoir ceux qui croiraient en lui. En effet, il ne pouvait y avoir l'Esprit puisque Jésus n'avait pas encore été glorifié.
- Acclamons la Parole de Dieu.
Jn 7, 37-39